Ordonnances de sursis

De Le carnet de droit pénal
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Introduction

Une condamnation avec sursis est une peine d'emprisonnement qui peut être purgée dans la communauté à des conditions strictes, généralement sous forme d'assignation à résidence, pour une durée maximale de deux ans moins un jour.

La disposition d'habilitation stipule que:

Octroi du sursis

742.1 Le tribunal peut ordonner à toute personne qui a été déclarée coupable d’une infraction de purger sa peine dans la collectivité afin que sa conduite puisse être surveillée — sous réserve des conditions qui lui sont imposées en application de l’article 742.3 [conditions d'ordonnance de sursis] —, si elle a été condamnée à un emprisonnement de moins de deux ans et si les conditions suivantes sont réunies :

a) le tribunal est convaincu que la mesure ne met pas en danger la sécurité de la collectivité et est conforme à l’objectif essentiel et aux principes énoncés aux articles 718 à 718.2 [general sentencing provisions];
b) aucune peine minimale d’emprisonnement n’est prévue pour l’infraction;
c) il ne s’agit pas d’une infraction prévue à l’une ou l’autre des dispositions suivantes :
(i) l’article 239 (tentative de meurtre), pour laquelle une peine au titre de l’alinéa 239(1)b) est infligée,
(ii) l’article 269.1 (torture),
(iii) l’article 318 (encouragement au génocide);
d) il ne s’agit pas d’une infraction de terrorisme ni d’une infraction d’organisation criminelle poursuivies par mise en accusation et passibles d’une peine maximale d’emprisonnement de dix ans ou plus.
e) [Abrogé, 2022, ch. 15, art. 14]
f) [Abrogé, 2022, ch. 15, art. 14]

1992, ch. 11, art. 16; 1995, ch. 19, art. 38, ch. 22, art. 6; 1997, ch. 18, art. 107.1; 2007, ch. 12, art. 1; 2012, ch. 1, art. 34; 2022, ch. 15, art. 14.

CCC (CanLII), (Jus.)


Note: 742.1

Sursis et incarcération

Une ordonnance de sursis (OS) est une forme d'incarcération.[1]

Une peine avec sursis, qui est une période d’incarcération, peut satisfaire aux principes de dénonciation et de dissuasion. Cependant, une peine avec sursis est plus clémente lorsqu’on la compare à une peine d’emprisonnement de durée équivalente.[2] Les aspects dénonciateurs et l'effet dissuasif « augmenteront avec le degré de restriction de la liberté » comme le prévoient les termes de l'ordonnance.[3]

Une peine avec sursis n'est pas la même chose qu'une probation. La première est punitive et réhabilitatrice, tandis que la seconde n'a qu'un but réhabilitatoire.[4]

Objectif

L'objectif de la peine avec sursis est de réduire le recours à l'incarcération comme sanction et d'accroître les objectifs de justice réparatrice.[5]

Les OSC sont généralement plus efficaces pour atteindre « les objectifs réparateurs de réadaptation, de réparation à la victime et à la collectivité, et de promotion d'un sens des responsabilités chez le délinquant et de reconnaissance du préjudice causé à la victime et à la collectivité. »[6]

Constitutionnalité

Les restrictions imposées aux peines avec sursis pour les infractions passibles d'une peine maximale de 14 ans ne contreviennent pas à l'art. 12 de la Charte parce qu'elles constituent une peine cruelle et inhabituelle.[7] Cependant, en Ontario, l'impossibilité d'accorder des peines avec sursis aux délinquants autochtones contrevient à l'art. 7 de la Charte et est radiée. [8]

Contrôle en appel

La décision d'ordonner une peine avec sursis mérite une « déférence considérable ».[9]

Historique

L'option de peine avec sursis a été introduite en 1996 comme « solution de rechange significative pour les délinquants moins dangereux et non dangereux ».[10]

  1. R c LFW, 1997 CanLII 10868 (NL CA), Nfld. & PEIR 115(Nfld. C.A.), par Marshall JA
    R c Oliver (E.M.), 1997 CanLII 14631 (NL CA), Nfld. & PEIR 210 (Nfld. C.A.), par Cameron JA
    R c Quality (R.), 1997 CanLII 14660 (NL CA), Nfld. & PEIR 320 (Nfld. C.A.), par Gushue JA
    R c JM, 1998 CanLII 18034 (NL CA), Nfld. & PEIR 38 (Nfld. C.A.), par Green JA
  2. , ibid., au para 102
  3. R c Hall, 2001 BCCA 74 (CanLII), par Saunders JA, au para 16 ("...it is clear that a conditional sentence's denunciatory aspects and deterrent effect increase with the degree of restriction on liberty which is incorporated in the terms of the conditional sentence.")
  4. , ibid., au para 127
  5. R c Proulx, 2000 SCC 5 (CanLII), [2000] 1 SCR 61, per Lamer CJ, au para 127
    R c Sharma, 2022 SCC 39 (CanLII), per Brown and Rowe JJ, au para 9
  6. , ibid., au para 127
  7. R c Neary, 2016 SKQB 218 (CanLII), par RS Smith J - en lien avec les infractions liées au trafic de drogue
  8. R c Sharma, 2020 ONCA 478 (CanLII), 390 CCC (3d) 1, par Feldman JA
  9. R c Peterson, 2005 CanLII 37972 (ON CA), 201 CCC (3d) 220, par Weiler JA, au para 58
    R c Rage, 2018 ONCA 211 (CanLII), par curiam, au para 10 ("It is well established in the jurisprudence that a trial judge’s decision regarding the appropriateness of a conditional sentence is entitled to considerable deference")
  10. Proulx, supra, aux paras 14 à 21

Admissibilité

Les conditions prévues à l'art. 742.1 pour une peine avec sursis sont résumées comme suit :

  1. l'infraction n'a pas de peine minimale obligatoire
  2. une infraction passible d'une peine maximale de 10 ans n'est « pas »
    1. une infraction de terrorisme, ou
    2. une infraction d'organisation criminelle,
  3. la peine appropriée est inférieure à deux ans
  4. une peine dans la communauté ne mettrait pas en danger la sécurité de la communauté
    1. compte tenu du risque de récidive du délinquant ; et,
    2. compte tenu de la gravité des dommages qui pourraient résulter d'une récidive.
  5. la peine appropriée conforme à l'objectif et aux principes fondamentaux de la détermination de la peine

Une peine d'emprisonnement avec sursis peut être imposée à une personne en libération conditionnelle.[1]

Présomptions

Il n'existe aucune présomption pour ou contre les peines d'emprisonnement avec sursis.[2] Cependant, on considère qu'elles sont « probablement plus appropriées » lorsqu'une « combinaison d'objectifs punitifs et réparateurs » doit être atteinte.[3]

Constitutionnalité

Les restrictions imposées aux peines d'emprisonnement avec sursis pour certaines catégories d'infractions ne violent pas l'art. 7 ou 12 de la Charte.[4]

  1. R c Harris, 2000 BCCA 599 (CanLII), par Ryan JA
  2. Proulx, supra, au para 127
  3. Proux, supra, au para 127
  4. R c Barrons, 2017 NSSC 368 (CanLII), par Arnold J
    R c DeYoung, 2017 NSCA 13 (CanLII), per Farrar JA
    R c Sawh, 2016 ONSC 7797 (CanLII), par Garton J

Pénalités minimales obligatoires

Voir également: Peines maximales et minimales

Les infractions minimales obligatoires ne donnent pas droit à une peine avec sursis. Les infractions assorties de peines minimales sont identifiables par la présence de la peine minimale dans la définition de l'infraction.

Moins de deux ans

Avant qu'un juge puisse imposer une peine avec sursis, il doit être convaincu que la prison et la probation ne sont pas appropriées.[1]

Lorsqu'une peine pénitentiaire « ne peut être exclue », une ordonnance de probation obligatoire ne peut être imposée.[2]

  1. R c Proulx, 2000 SCC 5 (CanLII), [2000] 1 SCR 61, per Lamer CJ, au para 58
  2. , ibid. au para 58
    {R c Smith, 2023 ONCA 620 (CanLII), par curiam, au para 7

Sécurité de la collectivité

Le juge chargé de la détermination de la peine doit procéder à une « évaluation des risques » pour déterminer si le délinquant constitue un risque pour la sécurité de la collectivité.[1]

L'évaluation du risque pour la collectivité se divise en deux dimensions : 1) le risque de récidive et 2) la gravité du danger en cas de récidive.[2]

Le risque de récidive doit être pris en considération à la lumière des « conditions liées à la peine ». Lorsqu'il existe un risque pour la communauté, le risque peut être minimisé en imposant des « conditions appropriées dans la peine ». [3] Ainsi, un risque est acceptable tant qu'il est maîtrisable dans le cadre de la peine.

Le non-respect antérieur des ordonnances du tribunal constitue un « facteur de poids » contre la possibilité d'une peine avec sursis. Il peut s'agir d'une preuve que le délinquant est peu susceptible de se conformer et que la peine n'aura probablement pas d'effet dissuasif ou réhabilitateur.[4]

  1. voir R c Soldat, 2012 MBCA 39 (CanLII), 280 Man R (2d) 109, par M Monnin JA, au para 14
    R c Eckert, 2006 MBCA 6 (CanLII), 201 Man R (2d) 175, par Steel JA
  2. see R c Knoblauch, 2000 SCC 58 (CanLII), [2000] 2 SCR 780, par Arbour J (5:4)
  3. , ibid., au para 27
  4. R c Wright, 2011 ABCA 42 (CanLII), 502 AR 318, per McDonald JA, au para 12
    see also R c Wilson, 2009 ABCA 257 (CanLII), 457 AR 373, par curiam at 37
    R c Melvin, 2010 NSCA 5 (CanLII), 912 APR 235, par Bateman JA, au para 9
    R c Viscomi, 2012 ABCA 135 (CanLII), 545 WAC 241, par curiam
    R c AB, 2012 MBCA 25 (CanLII), 275 Man R (2d) 285, par Chartier JA

Respect des principes et des objectifs de la détermination de la peine

Infractions sexuelles contre des enfants
Voir également: Infractions sexuelles#Infractions sexuelles contre les jeunes

Les ordonnances de sursis pour infractions sexuelles contre des enfants seront « très rarement » appropriées en l'absence de « circonstances exceptionnelles limitées ».[1]

  1. R c MM, 2022 ONCA 441 (CanLII) (hyperliens fonctionnels en attente), par curiam, au para 16
    R c BM, 2023 ONCA 224 (CanLII) (hyperliens fonctionnels en attente), par Harvison Young JA, au para 2

Procédure

Imposition de conditions

Violations des peines avec sursis

Effet de la garde sur d'autres questions

Nouvelle infraction

742.7 (1) Lorsque le délinquant faisant l’objet d’une ordonnance de sursis est emprisonné en raison d’une peine infligée pour une autre infraction, quelle que soit l’époque de la perpétration de celle-ci, l’exécution de l’ordonnance en ce qui touche sa durée est suspendue pendant la période d’emprisonnement.

Manquement à une condition d’une ordonnance de sursis

(2) Si une ordonnance de détention est rendue en vertu des alinéas 742.6(9)c) ou d), la période de détention est purgée consécutivement à toute autre période d’emprisonnement que le délinquant purge alors, sauf si le tribunal est d’avis que cela ne serait pas dans l’intérêt de la justice.

Autre peine d’emprisonnement

(3) La période de détention visée au paragraphe (2) et toute autre période d’emprisonnement sont réputées, pour l’application de l’article 743.1 et de l’article 139 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, être une seule peine d’emprisonnement.

Fin de la suspension

(4) La suspension de l’exécution de l’ordonnance de sursis en ce qui touche sa durée cesse dès que le délinquant soumis à une surveillance au sein de la collectivité est libéré de prison au titre d’une libération conditionnelle ou d’office ou d’une réduction de peine méritée, ou à l’expiration de sa peine d’emprisonnement.

1995, ch. 22, art. 6; 1999, ch. 5, art. 42; 2004, ch. 12, art. 16(A)


[annotation(s) ajoutée(s)]

CCC (CanLII), (Jus.)


Note: 742.7(1), (2), (3), et (4)

Modifications de peine

Voir également: Ordonnances de probation#Modifications

Le surveillant des peines peut recommander des modifications aux conditions facultatives de l'ordonnance en cas de changement de circonstances. Un avis de la modification proposée doit être fourni au tribunal et à l'avocat. Il est généralement entendu que les modifications ne doivent pas être de nature substantielle et ne pas modifier l'objet de l'ordonnance initiale. La demande ne doit pas être présentée par le délinquant.[1]

Modification des conditions facultatives

742.4 (1) L’agent de surveillance qui estime que l’évolution des circonstances justifie la modification des conditions facultatives notifie par écrit les modifications proposées et les motifs à leur appui au délinquant, au poursuivant et au tribunal.

Audience

(2) Dans les sept jours suivant la notification, le délinquant ou le poursuivant peuvent demander au tribunal la tenue d’une audience pour étudier les modifications proposées, ou le tribunal peut d’office ordonner la tenue d’une audience à cette fin; l’audience a lieu dans les trente jours suivant la réception de la notification par le tribunal.

Décision

(3) À l’audience, le tribunal rejette ou approuve les modifications proposées et peut apporter aux conditions facultatives toute autre modification qu’il estime indiquée.

Absence de demande d’audience

(4) Dans le cas où la demande d’audience n’est pas présentée dans le délai prévu au paragraphe (2), les modifications proposées prennent effet dans les quatorze jours suivant la réception par le tribunal de la notification prévue au paragraphe (1); l’agent de surveillance avise alors le délinquant et dépose la preuve de la notification au tribunal.

Modifications proposées par le délinquant ou le poursuivant

(5) Les paragraphes (1) et (3) s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux propositions de modification des conditions facultatives effectuées par le délinquant ou le poursuivant; l’audience est alors obligatoire et est tenue dans les trente jours suivant la réception par le tribunal de la notification prévue au paragraphe (1).

Juge en chambre

(6) Les attributions conférées au tribunal par le présent article peuvent être exercées par le juge en chambre.

1995, ch. 22, art. 6; 1999, ch. 5, art. 39


[annotation(s) ajoutée(s)]

CCC (CanLII), (Jus.)


Note: 742.4(1), (2), (3), (4), (5), et (6)

Un changement d'adresse ne peut pas être effectué simplement en appelant et en laissant un message vocal sur le répondeur du superviseur.[2]

Il n'existe aucun mécanisme dans le Code permettant de transférer un CSO vers une juridiction à l'extérieur du Canada.[3]

  1. R c Kobsar, 2004 ABQB 817 (CanLII), 192 CCC (3d) 224, per Germain J
  2. R c Sullivan, 2009 CanLII 59436 (NL PC), par Gorman J
  3. R c Goett, 2012 ABCA 215 (CanLII), 557 WAC 264, par curiam (3:0)

Transférer les ODS vers différentes provinces

Transfert d’une ordonnance

742.5 (1) Lorsqu’un délinquant soumis à une ordonnance de sursis devient résident d’une circonscription territoriale autre que celle où l’ordonnance a été rendue, le tribunal qui a rendu l’ordonnance peut, sous réserve du paragraphe (1.1), à la demande de l’agent de surveillance, transférer l’ordonnance à un tribunal de cette autre circonscription territoriale qui aurait, étant donné la forme du procès du délinquant, eu compétence pour rendre l’ordonnance dans cette autre circonscription territoriale si le délinquant y avait subi son procès et y avait été déclaré coupable de l’infraction au sujet de laquelle l’ordonnance a été rendue; le tribunal auquel l’ordonnance a été transférée peut, dès lors, statuer sur l’ordonnance et l’appliquer à tous égards comme s’il l’avait rendue.

Consentement du procureur général

(1.1) L’ordonnance ne peut être transférée :

a) qu’avec le consentement du procureur général de la province où elle a été rendue, si les deux circonscriptions territoriales ne sont pas situées dans la même province;
b) qu’avec le consentement du procureur général du Canada, si les procédures à l’origine de l’ordonnance ont été engagées par celui-ci ou en son nom.
Incapacité d’agir du tribunal

(2) Lorsque le tribunal qui a rendu une ordonnance de sursis ou à qui une ordonnance de sursis a été transférée en application du paragraphe (1) est pour quelque raison dans l’incapacité d’agir, les pouvoirs de ce tribunal concernant cette ordonnance peuvent être exercés par tout autre tribunal ayant une juridiction équivalente dans la même province.

1995, ch. 22, art. 6; 1999, ch. 5, art. 40. 
[annotation(s) ajoutée(s)]

CCC (CanLII), (Jus.)


Note: 742.5(1), (1.1) et (2)

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