Cette page a été mise à jour ou révisée de manière substantielle pour la dernière fois June 2021. (Rev. # 13384)
n.b.: Cette page est expérimentale. Si vous repérez une grammaire ou un texte anglais clairement incorrect, veuillez m'en informer à [email protected] et je le corrigerai dès que possible.

Principes généraux

L'article 12 de la Charte garantit, sous la rubrique « traitement ou peine », que :

Cruauté

12 Chacun a droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités.

CCDL

La signification de « cruel et inhabituel » se concentre sur la question de savoir si le « traitement » était « grossièrement disproportionné » ou « contraire aux normes de décence ».[1] La norme est une « barre haute ».[2] Les tribunaux devraient veiller à ne pas « stigmatiser chaque peine disproportionnée ou excessive ».[3]

The two words "cruel" and "unusual" are not to be treated as conjunctive whereby separate assessments for each word are required. They should be tread as a "compendious expression of a norm."[4]

Recours

Une exemption constitutionnelle n'est pas un recours disponible lorsqu'une peine minimale obligatoire viole l'art. 12 de la Charte.[5]

Histoire

L'expression « peine cruelle et inhabituelle » trouve son origine dans la Déclaration des droits anglaise de 1688, qui protégeait contre les amendes et les peines excessives.[6]

  1. See R c Smith, 1987 CanLII 64 (SCC), [1987] 1 SCR 1045, par Wilson J, aux pp. 1072-74
  2. R c Hills, 2020 ABCA 263 (CanLII), 2 WWR 31, par O’Ferrall JA, au para 37
  3. Smith, supra at para 55 ("The test for review under s. 12 of the Charter is one of gross disproportionality, because it is aimed at punishments that are more than merely excessive. We should be careful not to stigmatize every disproportionate or excessive sentence as being a constitutional violation, and should leave to the usual sentencing appeal process the task of reviewing the fitness of a sentence")
  4. , ibid., au para 114
    Miller et al v The Queen, 1976 CanLII 12 (SCC), [1977] 2 SCR 680, par Laskin CJ at 689-90 (SCR)
  5. R c Ferguson, 2008 SCC 6 (CanLII), [2008] 1 SCR 96, par McLachlin CJ, au para 2
  6. 9147-0732 Québec inc. c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2019 QCCA 373 (CanLII), JQ no 1443, par Belanger JA, au para 113 (2:1)

Traitement ou peine

L'imposition d'une interdiction de port d'armes en vertu de l'article 109 est une forme de peine.[1] As is the making of a forfeiture order.[2]

L'imposition d'une ordonnance en vertu de la LERDS ne l'est pas.[3]

  1. R c Wiles, 2005 SCC 84 (CanLII), [2005] 3 SCR 895, par Charron J, au para 3 ("The Crown concedes that a weapons prohibition order constitutes a “treatment or punishment” within the meaning of s. 12 of the Charter. In my view, this concession is well made. Although the purpose of the prohibition order is primarily preventative, in taking away the privilege to possess weapons, it may have some punitive effect on the offender. The question then is whether the loss of this privilege upon conviction of the offence of production is “cruel and unusual”.")
  2. R c Montague, 2014 ONCA 439 (CanLII), 120 OR (3d) 401, par Feldman JA, au para 38 ("In my view, the explanation that applies to loss of the right to possess weapons can also apply to the forfeiture of weapons under s. 491(1)(b). Even if the forfeiture is not intended to be a punishment as part of the sentence, it is a consequence of conviction of certain weapons offences that may have a punitive effect. Furthermore, the Crown has allowed in its factum that the forfeiture provision may be a “treatment” for the purpose of s. 12 of the Charter.")
  3. R c Cross, 2006 NSCA 30 (CanLII), 205 CCC (3d) 289, par Bateman JA

Peine cruelle et inhabituelle

La question de savoir si une peine est « cruelle et inhabituelle » dépend de la question de savoir « si la peine est grossièrement disproportionnée », ce qui exige qu'elle soit plus qu'« excessive », « inappropriée » ou « excessive ». Elle doit être « excessive au point de ne pas respecter les normes de décence » et disproportionnée au point que les Canadiens « trouveraient la peine odieuse ou intolérable ».[1]

L'analyse se déroule en deux étapes :[2]

  1. examiner l'effet de la disposition sur le délinquant en question, ce qui inclut l'examen des facteurs suivants :
    1. la gravité de l'infraction,
    2. les caractéristiques personnelles du délinquant et les circonstances de l'affaire,
    3. l'effet réel de la peine sur l'individu,
    4. les objectifs pénologiques et les principes de détermination de la peine sur lesquels la peine est fondée,
    5. l'existence d'alternatives valables à la peine imposée, et
    6. une comparaison des peines imposées pour d'autres crimes dans la même juridiction
  2. si la peine n'est pas grossièrement disproportionnée, envisager des « hypothèses raisonnables » qui « pourraient survenir couramment dans la vie de tous les jours » mais qui ne sont pas farfelues ou « à peine imaginables »[3]
Une approche proposée

Il a été suggéré que l’analyse devrait suivre les étapes suivantes :[4]

  1. déterminer une peine appropriée (en l’absence de peine minimale obligatoire) qui est proportionnelle à la gravité du crime de l’accusé et aux circonstances dans le contexte des objectifs et principes de détermination de la peine pertinents ;
  2. déterminer si la peine minimale obligatoire prescrite par la loi est totalement disproportionnée par rapport à l’infraction de l’accusé et à sa situation personnelle ;
  3. déterminer si la peine minimale obligatoire serait totalement disproportionnée pour un délinquant hypothétique raisonnablement prévisible ; et
  4. la peine appropriée pour l’accusé.
  1. R c Ferguson, 2008 SCC 6 (CanLII), [2008] 1 SCR 96, par McLachlin CJ, au para 14 ("The test for whether a particular sentence constitutes cruel and unusual punishment is whether the sentence is grossly disproportionate: R c Smith, 1987 CanLII 64 (SCC), [1987] 1 SCR 1045. As this Court has repeatedly held, to be considered grossly disproportionate, the sentence must be more than merely excessive. The sentence must be “so excessive as to outrage standards of decency” and disproportionate to the extent that Canadians “would find the punishment abhorrent or intolerable”: ... .")
    R c Smith, 1987 CanLII 64 (SCC), [1987] 1 SCR 1045, par Wilson J
    R c McDonald, 1998 CanLII 13327 (ON CA), [1998] OJ 2990 (ONCA), par Rosenberg JA, au para 68 ("The test for whether a punishment is cruel and unusual is whether it is grossly disproportionate to what would have been appropriate. The punishment must be so excessive as to outrage standards of decency. A sentence that is merely excessive or even unfit, is not necessarily grossly disproportionate.")
  2. R c Montague, 2014 ONCA 439 (CanLII), 120 OR (3d) 401, par Feldman JA, au para 40 ("The test is applied in a two-stage analysis. The court first examines the effect of the impugned provision on the particular offender. That involves considering a number of contextual factors including: the gravity of the offence, the personal characteristics of the offender and the circumstances of the case, the actual effect of the punishment on the individual, the penological goals and sentencing principles upon which the sentence is fashioned, the existence of valid alternatives to the punishment imposed, and a comparison of punishments imposed for other crimes in the same jurisdiction: ... . If the punishment is not found to be grossly disproportionate for the affected individual, then at the second stage, the court is to consider “reasonable hypotheticals” that “could commonly arise in day-to day-life” but are not far-fetched or “marginally imaginable”:...")
    R c Morrissey, 2000 SCC 39 (CanLII), [2000] 2 SCR 90, par Gonthier J, aux paras 27 to 28
    R c Latimer, 2001 SCC 1 (CanLII), [2001] 1 SCR 3, par curiam, au para 75 ("...a full contextual understanding of the sentencing provision also requires a consideration of the actual effect of the punishment on the individual, the penological goals and sentencing principles upon which the sentence is fashioned, the existence of valid alternatives to the punishment imposed, and a comparison of punishments imposed for other crimes in the same jurisdiction. However, not all of these matters will be relevant to the analysis and none of these standing alone will be decisive to a determination of gross disproportionality.")
    R c Nur, 2013 ONCA 677 (CanLII), 117 OR (3d) 401, par Doherty JA, au para 78, appealed to 2015 SCC 15 (CanLII), par McLachlin CJ
  3. R c Goltz, 1991 CanLII 51 (SCC), [1991] 3 SCR 485, par Gothier J, aux pp. 505, 516
  4. R c Cvitko, 2021 ABPC 52 (CanLII), par Saccomani J, au para 17

"Trop disproportionnée"

Ce ne sera que dans des cas « rares et uniques » que le tribunal jugera une peine grossièrement disproportionnée.[1]

La disproportion flagrante doit être « compte tenu de la nature de l'infraction et des circonstances de l'infraction ».[2]

Ce qui est grossièrement disproportionné doit être « plus que simplement excessif ».[3] Il a été suggéré qu’une peine manifestement disproportionnée n’est pas nécessairement cruelle et habituelle.[4]

La norme de l’article 12 doit appliquer un test « rigoureux et exigeant », sinon elle risque de « banaliser la Charte ».[5]

La peine doit être « excessive au point de porter atteinte aux normes de décence » et « odieuse ou intolérable » pour la société canadienne.[6]

Une personne ne devrait pas être autorisée à « subir une peine manifestement disproportionnée simplement pour envoyer un message visant à décourager les autres de commettre des délits ».[7]

Pour déterminer si une peine est « manifestement disproportionnée », le tribunal prend en compte des facteurs tels que :[8]

  • le préjudice causé par l'infraction
  • l'effet de la conduite criminalisée sur les victimes individuelles et sur la communauté dans son ensemble ;
  • la mesure dans laquelle le préjudice causé par la conduite interdite affecte de manière disproportionnée des catégories distinctes et particulièrement vulnérables de victimes ;
  • les problèmes associés à la prévention et à la détection efficaces de l'activité criminelle impliquée dans l'infraction ;
  • la valeur dissuasive des peines minimales obligatoires ; et
  • l'intention et le but du législateur de la disposition.

Le tribunal peut également prendre en compte :[9]

  • « si la peine est nécessaire pour atteindre un objectif pénal valable »,
  • « les effets de la peine sur le délinquant réel ou hypothétique »
  • « si la peine est fondée sur des principes de détermination de la peine reconnus » et
  • « s'il existe des alternatives valables à la peine »

Aucune considération en soi n'est considérée comme déterminante.[10]

« Abject », « intolérable » et « scandaleux »

Il a été suggéré que les normes énoncées ne constituent pas une invitation pour les tribunaux à prendre en compte les attitudes du public, car celui-ci n'a pas son mot à dire dans la détermination de ce qui constitue une peine proportionnée.[11] Le tribunal doit plutôt décider d'abord si une peine est exagérément disproportionnée dans le contexte de la « justice et de l'équité » et si la peine est jugée injuste ou non équitable, elle sera alors nécessairement « odieuse », « intolérable » et scandaleuse.[12]

  1. R c Steele v. Mountain Institution, 1990 CanLII 50 (SCC), [1990] 2 SCR 1385, par Cory J at 1417 (SCR) ("It will only be on rare and unique occasions that a court will find a sentence so grossly disproportionate that it violates the provisions of s. 12 of the Charter. The test for determining whether a sentence is disproportionately long is very properly stringent and demanding. A lesser test would tend to trivialize the Charter.")
  2. R c Nur, 2015 SCC 15 (CanLII), [2015] 1 SCR 773, par McLachlin CJ, au para 39
    R c Smith, 1987 CanLII 64 (SCC), [1987] 1 SCR 1045, par Lamer J at p. 1073
  3. R c Lloyd, 2016 SCC 13 (CanLII), [2016] 1 SCR 130, par McLachlin CJ, au para 24
    Smith, supra, au p. 1072
  4. R c Hills, 2020 ABCA 263 (CanLII), 2 WWR 31, par O'Farrell JA (concurring), au para 116
  5. Steele, supra at p. 1417 (SCR) ("It will only be on rare and unique occasions that a court will find a sentence so grossly disproportionate that it violates the provisions of s. 12 of the Charter. The test for determining whether a sentence is disproportionately long is very properly stringent and demanding. A lesser test would tend to trivialize the Charter.")
  6. , ibid., au para 24
    R c Ferguson, 2008 SCC 6 (CanLII), [2008] 1 SCR 96, par McLachlin CJ
    R c Morrisey, 2000 SCC 39 (CanLII), [2000] 2 SCR 90, par Gonthier J, au para 26
    Smith, supra, au p. 1072
  7. Nur, supra, au para 45
  8. , ibid., au p. 1073 (SCR), par Lamer J
    R c Roach, 2009 ONCA 156 (CanLII), 246 OAC 96, par Doherty JA, au para 9
    R c Goltz, 1991 CanLII 51 (SCC), [1991] 3 SCR 485, par Gonthier J, au p. 500
    Morrisey, supra, aux paras 27 to 28
    see also R c Wiles, 2005 SCC 84 (CanLII), [2005] 3 SCR 895, par Charron J
    Ferguson, supra
  9. R c Boudreault, 2018 SCC 58 (CanLII), [2018] 3 SCR 599, par Martin J, au para 48
    Smith, supra, au p. 1072
    Goltz, supra, au p. 500
  10. R c Latimer, 2001 SCC 1 (CanLII), [2001] 1 SCR 3, par curiam, au para 75
  11. R c Drumonde, 2019 ONSC 1005 (CanLII), par Schreck J, au para 37 and 38 (" Determining what sentence is proportionate in a given situation is to be determined by the courts, not the public.")
  12. , ibid.

Caractère théorique

Lorsqu'une contestation en vertu de l'art. 12 de la Charte est portée devant le tribunal provincial statutaire, ce tribunal peut, à sa discrétion, choisir de ne pas se prononcer sur la constitutionnalité de la peine minimale obligatoire en cause.[1] Cependant, il a été suggéré que lorsque les MMP créent des planchers inflationnistes, il est nécessaire de considérer leur validité afin de calibrer la fourchette appropriée dans tous les cas.[2]

  1. See R c RA, 2019 NWTTC 10 (CanLII), par Gorin J, au para 35 ("Certainly a statutory court may make a preliminary finding that determining the issue could not make a difference in the case before it and accordingly elect not to determine the MMP’s constitutionality. However, the question of mootness is distinct from the issue of the MMP’s constitutional validity.")
    R c Lloyd, 2016 SCC 13 (CanLII), [2016] 1 SCR 130, aux paras 18 to 19 ("To be sure, it does not follow that a provincial court judge is obligated to consider the constitutionality of a mandatory minimum provision where it can have no impact on the sentence in the case at issue. Judicial economy dictates that judges should not squander time and resources on matters they need not decide. But a formalistic approach should be avoided. Thus, once the judge in this case determined that the mandatory minimum did not materially exceed the bottom of the sentencing range applicable to Mr. Lloyd, he could have declined to consider its constitutionality. To put it in legal terms, the doctrine of mootness should be flexibly applied. If an issue arises as to the validity of the law, the provincial court judge has the power to determine it as part of the decision­making process in the case.")
  2. R c Doucette, 2021 ONSC 371 (CanLII), par Schreck J, au para 21

Hypothèses raisonnables

Une « hypothèse raisonnable », dissociée des faits spécifiques de l’affaire, peut être invoquée dans le cadre d’une contestation fondée sur l’art. 12.[1] La portée de l'hypothèse est limitée aux cas qui sont « raisonnablement prévisibles ». [2]

La raison en est que l'analyse doit se concentrer sur la « nature de la loi » et non sur le « statut de l'accusé ». En interdisant les hypothèses, on viole la primauté du droit en permettant aux lois constitutionnelles de « rester en vigueur indéfiniment » en attendant que les faits appropriés soient établis.[3] Cela « limiterait considérablement la portée de la Charte et la capacité des tribunaux à s'acquitter de leur devoir de contrôler la constitutionnalité de la législation et de maintenir l'intégrité de l'ordre constitutionnel ».[4] Cela « compromettrait la perspective d'apporter une certitude à la constitutionnalité de la législation ».[5] Personne ne devrait être soumis à une décision inconstitutionnelle [6]

L'utilisation d'hypothèses est une manière de poser les questions suivantes : (a) quelle est la portée de la loi ? (b) quel type de conduite la loi est-elle raisonnablement censée viser ? et (c) quel est l'impact prévisible de la loi ?[7]

La « probabilité » de l'hypothèse

Il doit s'agir d'une hypothèse qui entraînera une peine disproportionnée pour « la situation de certaines personnes ».[8] Elle ne doit pas être fondée sur une « simple spéculation ».[9] Une loi ne devrait pas être invalidée « sur la base d'exemples qui ne se produiraient probablement jamais ».[10]

Une hypothèse raisonnable ne peut pas être constituée de « cas tirés par les cheveux ou à peine imaginables » ou d’« exemples éloignés ou extrêmes ».[11] Cela inclurait les cas les plus innocents et les plus sympathiques imaginables.[12]

Cela étant dit, l'hypothèse peut être prévisible « et » « peu susceptible de se produire ».[13]

Les caractéristiques personnelles peuvent être incluses dans l'hypothèse à condition qu'elles ne produisent pas d'exemples éloignés ou tirés par les cheveux.[14]

Il est recommandé au juge de commencer par des cas réels qui se sont produits comme points de départ lors de l'élaboration d'une hypothèse raisonnable.[15] À partir de ce cas réel, le tribunal peut alors « tirer des conclusions raisonnables de ces cas pour déduire quels autres cas sont raisonnablement prévisibles ». [16]

Le tribunal peut considérer les cas rapportés comme des exemples de cas réels « à condition que les faits pertinents soient suffisamment rapportés ». [17] Tout cas signalé, aussi marginal ou peu fréquent soit-il, peut être utilisé comme une hypothèse raisonnable.[18]

Test raisonnablement prévisible

Une loi violera l'art. 12 lorsque ses « applications raisonnablement prévisibles » imposeraient des peines grossièrement disproportionnées à d'autres délinquants.[19]

La question de « l’hypothèse raisonnable » consiste simplement à se demander s’il est « raisonnablement prévisible que la peine minimale obligatoire imposera des peines qui sont grossièrement disproportionnées à la situation de certaines personnes, ce qui entraînerait une violation de l’article 12. »[20] L’examen devrait se concentrer sur la question de savoir « si la peine serait manifestement disproportionnée dans des cas raisonnablement prévisibles ».[21]

Autres exigences des hypothèses

Les situations hypothétiques doivent être « fondées sur l'expérience judiciaire et le bon sens ».[22]

circonstances marginales ou aberrantes

Les hypothèses raisonnablement prévisibles incluent les cas « aberrants » qui ne sont pas susceptibles de se produire ou d'être poursuivis très fréquemment.[23] Elle ne devrait pas non plus exclure les conduites « marginales ».[24]

La prévisibilité ne se limite pas à celles « susceptibles de survenir dans le cadre de l’application quotidienne de la loi ».[25] La norme n’exclut pas non plus les infractions qui sont peu susceptibles de survenir.[26]

Le pouvoir discrétionnaire de la police et de la Couronne n’est pas un facteur

Le fait que la Couronne ou la police exerceront probablement leur pouvoir discrétionnaire pour ne pas autoriser une poursuite n’est pas un facteur pertinent.[27] Le fait que la Couronne puisse exercer son pouvoir discrétionnaire pour choisir de procéder par procédure sommaire n’est pas non plus un facteur.[28]

Lien avec les accusations

L'hypothèse doit établir l'infraction réelle reprochée et non une infraction connexe ou similaire, et ne peut pas non plus être composée de faits qui « laissent planer une incertitude quant à savoir si l'infraction est réellement établie ».[29]

Caractéristiques personnelles

Les caractéristiques personnelles du délinquant ne peuvent pas être « entièrement exclues ».[30] Cependant, il n'est pas approprié d'utiliser « des caractéristiques personnelles pour construire le cas le plus innocent et le plus sympathique imaginable ».[31]

  1. R c Nur, 2015 SCC 15 (CanLII), [2015] 1 SCR 773, par McLachlin CJ, au para 51
    See also R c Drug Mart Ltd., 1985 CanLII 69 (SCC), [1985] 1 SCR 295, par Dickson J at p. 314 ("[i]t is the nature of the law, not the status of the accused, that is in issue")
  2. , ibid., au para 58
  3. Nur, supra, au para 51 et 64
  4. Nur, supra, au para 63
  5. Nur, supra, au para 64
  6. Nur, supra, au para 51
    Big M, supra à la p. 313 (SCR)
  7. Nur, supra, au para 61
  8. Nur, supra, au para 57
  9. Nur, supra, au para 62 (« Les lois ne devraient pas être écartées sur la base de simples spéculations. »)
  10. Nur, supra au para 54
  11. R c Goltz, 1991 CanLII 51 (SCC), [1991] 3 SCR 485, par Gonthier J, aux pp. 506 and 515 [SCR]
    R c Charboneau, 2019 ABQB 882 (CanLII), au para 54 ("According to the analytical framework in Nur and Lloyd, a law violates s 12 if its “reasonably foreseeable applications” would impose grossly disproportionate sentences on offenders not currently before the court ... . To determine this, the court considers hypothetical situations where the mandatory minimum sentence would apply. These hypotheticals must be reasonable; hypotheticals that are fanciful or remote are excluded from consideration.")
    ("The inquiry into cases that the mandatory minimum provision may reasonably be expected to capture must be grounded in judicial experience and common sense. The judge may wish to start with cases that have actually arisen (I will address the usefulness of reported cases later), and make reasonable inferences from those cases to deduce what other cases are reasonably foreseeable. Fanciful or remote situations must be excluded: Goltz, at p. 506. To repeat, the exercise must be grounded in experience and common sense. Laws should not be set aside on the basis of mere speculation.")
  12. Nur, supra at para 75 ("...far-fetched or remotely imaginable examples should be excluded from consideration. This excludes using personal features to construct the most innocent and sympathetic case imaginable — on that basis almost any mandatory minimum could be argued to violate s. 12 and lawyerly ingenuity would be the only limit to findings of unconstitutionality.")
  13. Nur, supra au para 68
  14. Nur, supra au para 76
  15. R c Morrissey, 2000 SCC 39 (CanLII), [2000] 2 SCR 90, par Gonthier J, au para 33 ("Again, it is to be remembered that the courts are to consider only those hypotheticals that could reasonably arise. Homicide is far from a common occurrence in Canada. Criminal negligence causing death with a firearm is even less common. It is thus appropriate to develop hypotheticals from the case law by distilling their common elements. Goltz requires that hypotheticals be “common” rather than “extreme” or “far-fetched”. It is sufficient when dealing with a rare and uncommon crime that the hypotheticals be common examples of the crime rather than examples of common occurrences in day-to-day life. However, in constructing hypotheticals, courts can be guided by real life cases, but to the extent that these cases may not be exhaustively reported, they are not bound to limit the fashioning of hypotheticals to the cases that are made available to them. In fashioning hypotheticals for the purpose of a s. 12 analysis, reported cases can be used with caution as a starting point, and additional circumstances can be added to the scenario to construct an appropriate model against which to test the severity of the punishment. ")
    , ibid., au para 62 ("The judge may wish to start with cases that have actually arisen ..., and make reasonable inferences from those cases to deduce what other cases are reasonably foreseeable. Fanciful or remote situations must be excluded")
  16. , ibid., au para 62
  17. , ibid., au para 72 ("A third ancillary question is whether reported cases should be considered in determining whether it is reasonably foreseeable that a mandatory minimum sentencing provision will result in cruel and unusual punishment, contrary to the s. 12 guarantee. The majority in Morrisey said reported cases should be excluded if the court considers them “marginal”, and the minority, without qualification, said they may be considered. In my view, they can. Reported cases illustrate the range of real-life conduct captured by the offence. I see no principled reason to exclude them on the basis that they represent an uncommon application of the offence, provided that the relevant facts are sufficiently reported. Not only is the situation in a reported case reasonably foreseeable, it has happened. Reported cases allow us to know what conduct the offence captures in real life. However, they do not prevent the judge from having regard to other scenarios that are reasonably foreseeable: see Morrisey, at para. 33.")
  18. Charboneau, supra, au para 57
  19. R c Lloyd, 2016 SCC 13 (CanLII), [2016] 1 SCR 130, par McLachlin CJ, au para 22 ("The analytical framework to determine whether a sentence constitutes a “cruel and unusual” punishment under s. 12 of the Charter was recently clarified by this Court in Nur. A sentence will infringe s. 12 if it is “grossly disproportionate” to the punishment that is appropriate, having regard to the nature of the offence and the circumstances of the offender: ... . A law will violate s. 12 if it imposes a grossly disproportionate sentence on the individual before the court, or if the law’s reasonably foreseeable applications will impose grossly disproportionate sentences on others: ...")
  20. R c Nur, 2015 SCC 15 (CanLII), [2015] 1 SCR 773, par McLachlin CJ, au para 57
  21. , ibid., au para 57 (" Unfortunately, the word “hypothetical” has overwhelmed the word “reasonable” in the intervening years, leading to debate on how general or particular a hypothetical must be, and to the unfortunate suggestion that if a trial judge fails to assign a particular concatenation of characteristics to her hypothetical, the analysis is vitiated. With respect, this overcomplicates the matter. The question is simply whether it is reasonably foreseeable that the mandatory minimum sentence will impose sentences that are grossly disproportionate to some peoples’ situations, resulting in a violation of s. 12. The terminology of “reasonable hypothetical” may be helpful in this regard, but the focus remains squarely on whether the sentence would be grossly disproportionate in reasonably foreseeable cases. At its core, the process is simply an application of well established principles of legal and constitutional interpretation.")
  22. , ibid., au para 62 ("The inquiry into cases that the mandatory minimum provision may reasonably be expected to capture must be grounded in judicial experience and common sense.") see also para 75
  23. R c Morrison, 2019 SCC 15 (CanLII), [2019] 2 SCR 3, par Moldaver J
  24. Nur, supra, au para 68 ("The reasonable foreseeability test is not confined to situations that are likely to arise in the general day-to-day application of the law. Rather, it asks what situations may reasonably arise. It targets circumstances that are foreseeably captured by the minimum conduct caught by the offence. Only situations that are “remote” or “far-fetched” are excluded: Goltz, at p. 515. Contrary to what the Attorney General of Ontario suggests there is a difference between what is foreseeable although “unlikely to arise” and what is “remote [and] far-fetched”: A.F. (Nur), at para. 66. Moreover, adoption of the likelihood standard would constitute a new and radically narrower approach to constitutional review of legislation than that consistently adhered to since Big M. The Court has never asked itself whether a projected application of an impugned law is common or “likely” in deciding whether a law violates a provision of the Charter. To set the threshold for constitutional review at common or likely instances would be to allow bad laws to stay on the books.")
  25. , ibid., au para 68
  26. Charboneau, supra, au para 57
  27. Charboneau, supra, au para 58
  28. R c Ford, 2019 ABCA 87 (CanLII), 371 CCC (3d) 250, par Martin JA, au para 17 ("These hypotheticals are reasonable, foreseeable and realistic, and some are versions of actual cases. In my opinion, in the absence of a mandatory minimum provision, all would call for a sentence ranging from a suspended sentence to a conditional sentence, or at the most, a custodial sentence measured in days, not months. Accordingly, all demonstrate that the mandatory minimum sentence of one year imprisonment required to be imposed upon conviction of an offence under s 151(a) is grossly disproportionate as that term has been defined in Nur and Lloyd. As noted in Nur at paras 85–88, Crown discretion to proceed by summary conviction or to decline to charge cannot save a minimum sentence that mandates cruel and unusual punishment.")
    Nur, supra, aux paras 85 to 88
  29. R c Charboneau, 2019 ABQB 882 (CanLII), au para 56
    R c EJB, 2018 ABCA 239 (CanLII), 72 Alta LR (6th) 29, au para 66 ("As said, the search for a reasonable hypothetical, the existence of which would undermine the constitutionality of a minimum sentence, must consider a reasonable hypothetical for the crime charged and not for some other crime: ... . Nor would it be appropriate to consider a hypothetical set of facts where the offender might be acquitted of the offence charged. Nor would it be appropriate to consider factors in the hypothetical that do not or should not diminish the culpability of the offender for the crime charged.")
  30. , ibid., au para 74
  31. , ibid., au para 75

Exemples

Les hypothèses suivantes ont été approuvées par les tribunaux :

  • Pour une infraction visée à l'art. 286.1 [communication dans le but d'obtenir les services sexuels d'un mineur], l'hypothèse consistant à payer une personne de moins de 18 ans pour un baiser a été approuvée.[1]
  • Un jeune de 18 ans « communique avec un jeune de 17 ans plus sophistiqué, qui repousse rapidement les avances et ne prend aucune autre mesure ».[2]
  1. R c Badali, 2016 ONSC 788 (CanLII), par Glass J, au para 67
    R c Alvi, 2018 ABPC 136 (CanLII), par Robertson J, au para 71
  2. R c JLM, 2017 BCCA 258 (CanLII), 353 CCC (3d) 40, par Bennett JA, au para 60 ("Another example is a naïve 18-year-old young person who awkwardly propositions a more sophisticated 17-year-old classmate with money for a sexual service, and is immediately rebuffed (and likely ridiculed). A six-month minimum jail sentence would clearly be grossly disproportionate to this act and offender. A young adult offender with mental disabilities, who may have the mental function of a young teenager, would also be vulnerable to the mandatory minimum sentence if they engaged in conduct as noted above.")
    Alvi, supra

Peines minimales obligatoires

Voir également: Peines minimales obligatoires

Une sanction sera jugée contraire à l'art. 12 de la Charte lorsque « la peine prescrite est excessive au point de ne pas respecter les normes de décence ».[1]

Une peine minimale obligatoire constitue par nature une dérogation au principe de proportionnalité.[2] Elle modifie la capacité des juges à examiner « tous les facteurs pertinents ».[3] Elle « prive les tribunaux de la capacité d’adapter des peines proportionnées » dans les cas les plus graves et, dans les cas extrêmes, d’imposer des peines injustes.[4]

Enquête en deux phases

L’analyse de la constitutionnalité des dispositions relatives à la détermination des peines nécessite deux phases.[5]

Premièrement, le juge doit déterminer si la peine minimale est manifestement disproportionnée par rapport aux circonstances du délinquant et à l’infraction dont il est saisi.[6] Si la peine est manifestement disproportionnée, la peine minimale est alors inconstitutionnelle.

Deuxièmement, si la peine n'est « pas » exagérément disproportionnée, le juge peut alors procéder à la même analyse sur ce qu'il considérerait comme une hypothèse raisonnable selon laquelle la peine serait exagérément disproportionnée.[7]

L'analyse de la disproportion exige que le tribunal :

  1. détermine quelle est la peine proportionnée à l'infraction, en l'absence de la peine minimale obligatoire. Seule une échelle approximative de la peine appropriée est requise. Il n’est pas nécessaire de fixer une peine ou une fourchette.[8]
  2. demandez-vous si la peine minimale obligatoire nécessitera l’imposition d’une peine totalement disproportionnée.[9]
Historique des contestations des peines minimales obligatoires

Avant 2016, la Cour suprême du Canada n'avait jugé les peines minimales inconstitutionnelles que dans trois cas seulement.[10]

  1. R c Smith, 1987 CanLII 64 (SCC), [1987] 1 SCR 1045, par Lamer J, au p. 1072 [SCR]
    R c Miller, 1976 CanLII 12 (SCC), [1977] 2 SCR 680, par curiam, au p. 688 [SCR]
  2. R c Nur, 2015 SCC 15 (CanLII), [2015] 1 SCR 773, par McLachlin CJ, au para 44
  3. , ibid., au para 44
  4. , ibid., au para 44
  5. Smith, supra
    Nur, supra, au para 46
    R c Lloyd, 2016 SCC 13 (CanLII), [2016] 1 SCR 130, par McLachlin CJ, au para 23
  6. Nur, supra, au para 77
    Lloyd, supra, au para 22
  7. R c Crockwell, 2013 CanLII 8675 (NLSCTD), par Leblanc J, au para 32
    Nur, supra, au para 77
    Lloyd, supra, au para 22
  8. R c Ford, 2019 ABCA 87 (CanLII), 371 CCC (3d) 250, par Martin JA, au para 10
    Lloyd, supra, au para 23
  9. , ibid., au para 10 Lloyd, supra, au para 23
  10. Smith, supra - 7 ans minimum pour importation de stupéfiants
    Nur, supra - 3 ans minimum pour possession d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec munitions
    Lloyd, supra - 1 an minimum pour trafic de marijuana

Infractions considérées

Voir également: Peines minimales obligatoires

Conduite policière

Les facteurs à prendre en compte pour déterminer si le traitement de l'accusé par la police constitue un traitement cruel et inhabituel sont les suivants :[1]

  1. la décision d'utiliser la force de quelque nature que ce soit en première instance ;
  2. la nature et la gravité de l'infraction pour laquelle l'arrestation a été effectuée ;
  3. la certitude que l'infraction pour laquelle l'arrestation a été effectuée a réellement eu lieu ;
  4. la nécessité de la détention comme aspect de l'intervention ;
  5. la protection des agents et des autres personnes contre la violence ;
  6. la perspective de fuite/évasion ;
  7. la probabilité de poursuite/reprise de la conduite délictueuse ;
  8. l'état physique apparent de la personne arrêtée et/ou des victimes présumées ;
  9. les modules et la formation de la police concernant l'usage de la force ;
  10. la perspective d'une escalade et de représailles ;
  11. la connaissance de l'identité et l'accès à la personne à arrêter ;
  12. la nature et l'étendue de la force raisonnablement considérée comme susceptible d'être nécessaire ; et
  13. d'autres circonstances impérieuses.

En ce qui concerne la détermination de la peine, voir Charter Issues in Sentencing#Cruel and Unusual Punishment.

  1. R c Knight, 2010 ONCJ 400 (CanLII), 79 CR (6th) 39, par Clark J
    R c Magiskan, 2003 CanLII 859 (ON SC), [2003] OJ No 4490, par Zelinski J, au para 27

Traitement pendant la détention

La ségrégation « en soi » n'est pas une peine cruelle et inhabituelle, elle doit être « excessive au point de porter atteinte aux normes de décence ».[1]

  1. R c Olson, 1987 CanLII 4314 (ON CA), 38 CCC (3d) 534, par Brooke JA, aff’d [1989] 1 SCR 296, 1989 CanLII 120 (SCC), par curiam (“[s]egregation to a prison within a prison is not, per se, cruel and unusual treatment … [but] it may become so if it is so excessive as to outrage standards of decency.”)
    R c Marriott, 2014 NSCA 28 (CanLII), 309 CCC (3d) 305, par Oland JA

Voir également