Verdicts ordonnés

De Le carnet de droit pénal
Cette page a été mise à jour ou révisée de manière substantielle pour la dernière fois March 2021. (Rev. # 17782)

Principes généraux

Un verdict dirigé (ou une requête de non-lieu) est une requête de la défense présentée à la clôture de la présentation des preuves de la Couronne, mais avant que la défense ne puisse présenter des preuves, demandant le rejet de l'affaire au motif que les éléments essentiels de l'infraction ne sont pas établis. Il s'agit d'un droit de défense issu de la common law et non de la loi.[1] Historiquement, un juge qui obtenait gain de cause dans le cadre d'une requête en verdict dirigé ordonnait littéralement au jury de rendre un verdict de non-culpabilité.[2] Cela a depuis été modifié et n'implique plus le jury. Il s'agit simplement d'examiner une requête en non-lieu.[3]

Norme de contrôle

La norme de contrôle d'un verdict dirigé est celle de la rectitude fondée sur le fait qu'il s'agit d'une question de droit.[4]

  1. R c Litchfield, 1993 CanLII 44 (SCC), [1993] 4 SCR 333, per Iacobucci J, aux paras 49 to 50, 52, 56 and 57
    R c Timminco Ltd, 2001 CanLII 3494 (ON CA), 153 CCC (3d) 521, par Osborne JA, aux paras 18 to 20
    R c Rowbotham; Roblin, 1994 CanLII 93 (SCC), [1994] 2 SCR 463, per Lamer CJ, au p. 467 (" A directed verdict is not a creature of statute but rather of the common law. ")
  2. R c Declercq, 2012 ABPC 147 (CanLII), par Redman J, au para 4
  3. Declercq, supra
    Rowbotham, supra
  4. See R c Henderson (WE), 2012 MBCA 93 (CanLII), 284 Man R (2d) 164, par Chartier JA, au para 125
    R c O’Kane (PJ) et al, 2012 MBCA 82 (CanLII), 292 CCC (3d) 222, par Hamilton JA, au para 42
    R c Barros, 2011 SCC 51 (CanLII), 273 CCC (3d) 129, par Binnie J, au para 48 (“Whether or not the test is met on the facts is a question of law which does not command appellate deference to the trial judge”)
    R c Tomlinson, 2014 ONCA 158 (CanLII), 307 CCC (3d) 36, par Watt JA, au para 155
    R c Richard (D.R.) et al, 2013 MBCA 105 (CanLII), 299 Man R (2d) 1, par Cameron JA, au para 71

Test du verdict dirigé

Le test à appliquer pour un verdict dirigé est de savoir « s'il existe ou non des preuves [directes ou indirectes] sur la base desquelles un jury correctement instruit pourrait rendre un verdict de culpabilité ».[1]

Un verdict dirigé ne sera pas accordé s'il existe des éléments de preuve sur lesquels un jury raisonnable et correctement instruit pourrait rendre un verdict de culpabilité.[2] La requête en vue d'obtenir un verdict imposé ne devrait pas être accueillie si des éléments de preuve admissibles ont été présentés et que, s'ils étaient ajoutés au dossier, ils pourraient entraîner une condamnation. Pour satisfaire au critère établi dans l'arrêt Sheppard, la Couronne doit présenter des éléments de preuve de culpabilité pour chaque élément essentiel du crime pour lequel elle a la charge de la preuve.[3]

Enquête préliminaire ou procès

Ce test est le même que celui appliqué à la conclusion de l'enquête préliminaire en vertu du par. 548(1).[4]

  1. R c Arcuri, 2001 SCC 54 (CanLII), [2001] 2 SCR 828, par McLachlin CJ, au para 21 (The question to be asked by a preliminary inquiry judge under s. 548(1) of the Criminal Code is the same as that asked by a trial judge considering a defence motion for a directed verdict, namely, “whether or not there is any evidence upon which a reasonable jury properly instructed could return a verdict of guilty”)
    R c Monteleone, 1987 CanLII 16 (SCC), 35 CCC (3d) 193, par McIntyre J, au p. 160 to 161 ("whether direct or circumstantial [evidence], which, if believed by a properly charged jury acting reasonably, would justify a conviction, the trial judge is not justified in directing a verdict of acquittal.")
    The United States of America v Shephard, 1976 CanLII 8, , [1977] 2 SCR 1067, (1976) 30 CCC (2d) 424, per Ritchie J
    R c Charemski, 1998 CanLII 819 (SCC), 123 CCC (3d) 225, par Bastarache J, au para 2
    R c O’Kane (PJ) et al, 2012 MBCA 82 (CanLII), 292 CCC (3d) 222, par Hamilton JA, aux paras 40 to 41
    R c Al-Enzi, 2021 ONCA 81 (CanLII), par Tulloch JA, au para 148
    R c Hayes, 2020 ONCA 284 (CanLII), 391 CCC (3d) 453, par Tulloch JA, au para 65
    R c Tomlinson, 2014 ONCA 158 (CanLII), 307 CCC (3d) 36, par Watt JA, au para 151
  2. United States of America v Shephard
  3. Charemski, supra, au para 3
  4. see R c Beals, 2011 NSCA 42 (CanLII), 277 CCC (3d) 323, per Saunders JA, au para 20
    The Preliminary Hearing uses the test from United States of America v Shephard at 1080 (cited to SCR) ("Whether or not there is any evidence upon which a reasonable jury properly instructed could return a verdict of guilty.")
    Arcuri, supra, au para 21
    see Preuve de l'enquête préliminaire

Preuve

Le test reste généralement le même, que la preuve soit directe ou circonstancielle.[1]

Le juge doit être convaincu qu'il existe des preuves établissant chaque élément constitutif de l'infraction.[2]

Lorsqu'il est question de preuves directes, le juge ne doit pas 1) évaluer les éléments de preuve, 2) tester la qualité ou la fiabilité des éléments de preuve admissibles ou 3) tirer des conclusions de fait. Toutefois, les tribunaux sont autorisés à procéder à une « évaluation limitée » des éléments de preuve pour évaluer « si ceux-ci sont susceptibles d'étayer les conclusions que la Couronne demande au jury de tirer ».[3]

  1. Arcuri, supra, au para 22 ("The test is the same whether the evidence is direct or circumstantial")
    Mezzo v. The Queen, 1986 CanLII 16 (SCC), [1986] 1 S.C.R. 802, at pp. 842-43(citation complète en attente)
  2. Arcuri, supra, au para 21 ("Under this test, a preliminary inquiry judge must commit the accused to trial “in any case in which there is admissible evidence which could, if it were believed, result in a conviction”)
  3. Arcuri, supra, aux paras 1, 23
    R c Beals, 2011 NSCA 42 (CanLII), 277 CCC (3d) 323, per Saunders JA

Cas circonstanciel et inférences

Lorsque la Couronne s'appuie sur des preuves circonstancielles, la question se pose de savoir si les éléments non prouvables par une preuve directe « peuvent raisonnablement être déduits de preuves circonstancielles ». Cette évaluation des inférences impliquera une « pondération limitée » des preuves.[1]

Le juge doit déterminer si la preuve circonstancielle est « raisonnablement capable d'étayer les inférences » recherchées « et » si la preuve, si elle est crue, « étaye une inférence de culpabilité ».[2]

  1. Arcuri, supra, au para 23 ("The question then becomes whether the remaining elements of the offence – that is, those elements as to which the Crown has not advanced direct evidence – may reasonably be inferred from the circumstantial evidence. Answering this question inevitably requires the judge to engage in a limited weighing of the evidence because, with circumstantial evidence, there is, by definition, an inferential gap between the evidence and the matter to be established – that is, an inferential gap beyond the question of whether the evidence should be believed: ... The judge must therefore weigh the evidence, in the sense of assessing whether it is reasonably capable of supporting the inferences that the Crown asks the jury to draw. This weighing, however, is limited. The judge does not ask whether she herself would conclude that the accused is guilty. Nor does the judge draw factual inferences or assess credibility. The judge asks only whether the evidence, if believed, could reasonably support an inference of guilt")
    R c Tomlinson, 2014 ONCA 158 (CanLII), 307 CCC (3d) 36, par Watt JA, au para 153
    R c Arcuri, 2001 SCC 54 (CanLII), [2001] 2 SCR 828, par McLachlin CJ, aux paras 23, 30
  2. Tomlinson, supra, au para 154
    Arcuri, supra, au para 23

Évaluation des preuves

Le juge ne doit pas « évaluer les preuves pour en tester la qualité ou la fiabilité une fois qu'une décision sur leur admissibilité a été prise » et ne doit pas non plus tirer des conclusions de fait à partir des preuves qui lui sont présentées. Ces fonctions incombent au juge des faits, le jury."[1]

"L'évaluation limitée" dans les cas circonstanciels n'inclut pas les "inférences factuelles" pour évaluer la crédibilité ou la fiabilité.[2]

L'évaluation limitée n'implique pas, à proprement parler, de tirer des conclusions de fait. Le juge détermine plutôt si, "si l'on croit aux preuves de la Couronne, il serait raisonnable pour un jury correctement instruit de déduire la culpabilité". Il s'agit d'un exercice de "raisonnabilité des conclusions" recherchées être tirées des preuves circonstancielles.[3]

  1. Moteleone, supra, au p. 161
  2. Tomlinson, supra, au para 153
    Arcuri, supra, aux paras 23 et 30
  3. Arcuri, supra, au para 30

Infractions incluses

Lorsque l'infraction contient des infractions incluses, l'accusé peut demander un verdict dirigé sur l'infraction principale ainsi que sur certaines, mais pas sur toutes les infractions incluses.[1]

  1. R c Tomlinson, 2014 ONCA 158 (CanLII), 307 CCC (3d) 36, par Watt JA, au para 155
    R c Titus, 1983 CanLII 49 (SCC), [1983] 1 SCR 259, per Ritchie J, au p. 264

Voir également