Crédibilité et fiabilité des enfants témoins

De Le carnet de droit pénal
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Principes généraux

Il n’existe pas de formule fixe pour traiter les témoins enfants.[1]

Norme de l’« enfant raisonnable »

La crédibilité des enfants est généralement abordée de la même manière que celle des adultes. Cependant, la norme de l’« adulte raisonnable » peut ne pas être appropriée, car un [TRADUCTION] « enfant raisonnable » peut différer de celle d’un adulte.[2] « Les défauts, comme les contradictions, dans le témoignage d’un enfant ne nuisent pas autant à la crédibilité et à la fiabilité que les défauts équivalents dans le témoignage d’un adulte. »[3] Un enfant ne devrait pas être tenu aux mêmes [TRADUCTION] « normes rigoureuses » qu’un adulte.[4] Le témoignage d’un enfant doit être abordé selon le [TRADUCTION] « bon sens », « en tenant compte des forces et des faiblesses qui le caractérisent. »[5]

Différence de perception

Les enfants [TRADUCTION] « perçoivent le monde différemment des adultes », et l’absence de détails tels que le temps et le lieu est compréhensible et n’est pas nécessairement fatale.[6] Les stéréotypes sur les enfants doivent être évités.[7]

Même norme de contrôle

Quoi qu'il en soit, la norme de preuve pour la Couronne est toujours la même et doit être examinée avec le même niveau de contrôle.[8]

Appliquer un degré de contrôle plus élevé aux témoins de la défense qu’aux témoins de la Couronne constitue une erreur de droit.[9]

Aucune corroboration nécessaire

Dans certains cas, la culpabilité peut être établie sur la base du témoignage d'un seul enfant témoin sans corroboration.[10]

Incohérences

La culpabilité peut également être établie malgré la présence d'incohérences sur des questions matérielles, l'absence de plainte récente, le mobile de mentir et d'inventer, le passage du temps et la récupération de la mémoire.[11]

Passage du temps

Le passage d'un laps de temps important entre les événements et le dépôt des accusations ne justifie pas en soi une quelconque prudence.[12]

Souvenirs de l'enfant

Il est reconnu qu'un enfant [TRADUCTION] « se souviendra mieux des événements peu de temps après qu'ils se soient produits » que des semaines ou des mois après.[13]

Lignes directrices

Les lignes directrices suggérées comprennent :[14]

  1. la crédibilité des enfants témoins doit être évaluée avec soin (dans ce contexte, « avec soin » implique l’absence de parti pris en faveur de l’acceptation ou du rejet de cette preuve) ;
  2. la norme à appliquer pour évaluer la crédibilité d’un enfant témoin n’est pas nécessairement la même que celle appliquée à un adulte raisonnable ;
  3. il faut tenir compte du fait que les jeunes enfants peuvent ne pas être en mesure de raconter des détails précis et peuvent ne pas être en mesure de communiquer avec précision le « quand » et le « où » d’un événement, mais leur incapacité à le faire ne doit pas conduire à la conclusion qu’ils ont mal perçu ce qui leur est arrivé ou qui leur a fait quelque chose ;
  4. il n’existe aucune hypothèse ou présomption en droit selon laquelle le témoignage d’un enfant est moins fiable que celui d’un adulte ;
  5. il faut faire preuve de bon sens pour évaluer la crédibilité du témoignage d’un enfant, compte tenu de son âge, de son développement mental et de sa capacité à communiquer;
  6. les incohérences, notamment en ce qui concerne des éléments périphériques comme le temps ou le lieu, ne devraient pas avoir le même effet négatif sur la crédibilité d’un enfant que dans le cas d’un adulte, compte tenu de l’âge et du développement mental de l’enfant et d’autres facteurs pertinents;
  7. le fardeau de la preuve (culpabilité hors de tout doute raisonnable) demeure inchangé lorsque la preuve de la Couronne est fondée sur le témoignage d’un ou de plusieurs enfants. Plus précisément, les règles relatives à la crédibilité telles qu’énoncées par la Cour suprême du Canada dans l’affaire R c. D.W. ne changent pas simplement parce que la preuve de la Couronne est fondée sur ce type de preuve.
Aucune présomption de manque de fiabilité

On ne peut présumer qu'un témoin n'est pas fiable simplement en raison de son âge.[15] Toutefois, lorsque l'âge est particulièrement jeune, par exemple lorsqu'un enfant de 6 ans témoigne d'une époque où il avait moins de 2 ans, des considérations spéciales doivent être prises en compte.[16]

Les témoignages d’enfants qui sont explicites, clairs et sans ambiguïté et qui concordent avec ceux d’autres témoins sont particulièrement convaincants.[17]

Stéréotypes des enfants

Les juges commettent une erreur de droit en se fondant sur des stéréotypes pour déterminer la façon dont les enfants sont censés réagir dans les circonstances d’infractions sexuelles.[18]

Méthodes utilisées lors des entrevues avec des enfants

La conduite d'une entrevue avec un enfant peut favoriser ou nuire à la fiabilité de la déclaration. Les caractéristiques qui contribuent à la fiabilité comprennent :[19]

  • l'utilisation d'une petite salle privée avec des sièges confortables ;
  • un nombre limité de personnes dans la salle ;
  • un interrogatoire poli, simple, amical et non suggestif ;
  • l'absence de tout comportement, voix ou langage intimidant.
  1. R c Marquard, 1993 CanLII 37 (CSC), [1993] 4 RCS 223, par McLachlin J
  2. R c GB, 1990 CanLII 114 (CSC), [1990] 2 RCS 30, par McLachlin J, au para 48
    R c HC, 2009 ONCA 56 (CanLII), 241 CCC (3d) 45, par Watt JA, au para 42 ( [TRADUCTION] « Credibility requires a careful assessment, against a standard of proof that is common to young and old alike. But the standard of the “reasonable adult” is not necessarily apt for assessing the credibility of young children. Flaws, such as contradictions, in the testimony of a child may not toll so heavily against credibility and reliability as equivalent flaws in the testimony of an adult» )
  3. HC, supra, au para 42
  4. GB, supra, au para 48
  5. R c RW, 1992 CanLII 56 (CSC), [1992] 2 RCS 122, par McLachlin J
  6. , ibid., au para 24
    R c RRD, 2011 NLTD(G) 78(*pas de liens CanLII)
    R c BEM, 2010 BCCA 602 (CanLII), [2010] BCJ No 2787 (CA), par Bennett JA (3:0)
  7. RRD, supra
    BEM, supra
  8. GB, supra, au para 48
    RW, supra, au para 25 (the approach to child evidence does "not mean that the evidence of children should not be subject to the same standard of proof as the evidence of adult witnesses in criminal cases.» )
    Marquard, supra, aux pp. 221-222
    R c WS, 1994 CanLII 7208, 90 CCC (3d) 242, par Finlayson JA, au p. 251
    R c PB, [2011] OJ No 423 (SCJ)(*pas de liens CanLII)
    R c TP, 2010 CanLII 79501 (NL PC), [2010] NJ No 414 (P.C.), par Brazil J
  9. R c. Kiss, 2018 ONCA 184, aux paragr. 82(citation complète en attente)
    R c. Howe (2005), 2005 CanLII 253 (ON CA), 192 C.C.C. (3d) 480 (Ont. C.A.), [2005] O.J. No. 39
    R. c. Owen (2001), 2001 CanLII 3367 (ON CA), 150 O.A.C. 378 (C.A.), [2001] O.J. No. 4257
    R. c. T.(T.), 2009 ONCA 613, aux paragr. 71-74
  10. R c Vetrovec, 1982 CanLII 20 (CSC), [1982] 1 RCS 811, par Dickson J ( [TRADUCTION] « The common law, rejecting the 'numerical criterion' common to some legal systems, has traditionally held that the testimony of a single witness is a sufficient basis for a criminal conviction.» )
  11. R c François, 1994 CanLII 52 (CSC), [1994] 2 RCS 827, par McLachlin J
  12. R c Betker, 1997 CanLII 1902 (ON CA), 115 CCC (3d) 421, par Moldaver JA - un adulte témoigne d'abus lorsqu'il était enfant
  13. R c F(CC), 1997 CanLII 306 (CSC), [1997] 3 RCS 1183, par Cory J, au para 19 ( [TRADUCTION] « It is self‑evident to every observant parent and to all who have worked closely with young people that children, even more than adults, will have a better recollection of events shortly after they occurred than they will some weeks, months or years later.» )
  14. R c AF, 2007 BCPC 345 (CanLII), par Skilnick J
  15. R c VK, 1991 CanLII 5761 (BC CA), 68 CCC (3d) 18, par Wood JA, aux paras 18, 33
  16. R c CF, 1996 CanLII 623 (ON CA), 104 CCC (3d) 461, par Brooke JA, au para 18
    Marquard
  17. R c Marleau, 2005 CanLII 8667 (ON CA), 197 OAC 29, par Lang JA
  18. R c ARD, 2017 ABCA 237 (CanLII), 353 CCC (3d) 1, par curiam (2:1)
  19. R c SS, 2022 ONCA 305 (CanLII), par MacPherson JA, aux paras 86à 89 [dans le contexte d'une demande Bradshaw pour la déclaration d'un enfant]

Souvenirs retrouvés

L'exactitude des souvenirs des enfants peut être affectée négativement par le recours à la thérapie. Il faut faire preuve de prudence dans l'acceptation des souvenirs retrouvés.[1]

  1. PC v RC, 1994 CanLII 7501 (ON SC), 114 DLR (4th) 151, par Corbett J
    R c ZEB, 2006 NSSC 36 (CanLII), par Gruchy J, au para 42
    voir également R c GDD, [1995] NSJ No 529(*pas de liens CanLII)